Lilou la petite fée

Sophie Breuleux
le 6 novembre 2016

Lilou passait tout son temps à jouer dans les bois, et Maman n’aimait pas du tout cela. Elle avait très peur que Lilou s’égare, parce que tous les arbres sont pareils, et après on ne sait plus où on est. Maman préférait qu’elle joue à la plage, devant la maison, comme ça, elle pouvait lui envoyer des coucous et des bisous. Ce n’est pas que Lilou n’aimait pas la plage, elle aimait bien se tremper les pieds, et lancer des galets avec Papa, et regarder les petits poissons nager. Elle aimait seulement beaucoup plus la forêt. Elle pouvait se cacher, et préparer des potions, mais surtout, elle pouvait jouer avec les petites créatures des bois.

Lilou aimait bien les créatures des bois. Elle aimait bien les gnomes, avec leurs petites mains potelées. Elle aimait bien les esprits rieurs, qui faisaient danser les feuilles sur les arbres. Mais ce qu’elle préférait dans la forêt, c’était les fées. Les fées étaient très gentilles, avec leurs ailes multicolores qui brillaient comme des millions d’étincelles. Elles volaient et chatoyaient dans le ciel, comme de grands papillons. La fée Iris était la plus gentille et drôle des fées. Elle faisait toujours la fofolle pour faire rire Lilou ! La fée Iris était sa meilleure amie. Elles jouaient tous les jours ensemble.

Mais un beau matin, alors que les feuilles commençaient à croustiller sous les souliers, Maman et Papa annoncèrent qu’ils devaient rentrer, car l’été était terminé. Lilou ne voulait pas rentrer. En vacance, il y avait Maman, et Papa, et Lilou, et les fées, et à la ville, il y avait des voitures, et des bruits tout partout, et des chiens qui mordent, et de l’air qui sent mauvais. Il n’y avait pas de forêt, à la ville, et surtout pas de fées. Il n’y avait que des gazons et des gros buissons carrés.

« Il n’y a pas de fées, dans les buissons carrés », avait dit Lilou à Maman, mais elle ne voulait rien savoir : Papa et Maman devaient aller travailler, et Lilou devait commencer l’école.  « Comme une grande fille », avait dit Maman. Mais Lilou ne voulait pas être une grande fille, elle voulait être une petite fée. Lilou était bien triste. Elle ne voulait pas dire au revoir à la fée Iris. Pour la consoler, Maman lui donna une boîte à biscuits pour aller récolter des coquillages. Ça serait joli, non ? lui dit maman. Lilou ne voulait pas aller chercher des coquillages ! Elle se sauva dans la forêt. Quand elle retrouva la petite fée, elle sautait partout, partout, partout. Elle non plus, elle ne voulait pas perdre Lilou. Elle pointait Lilou, et les arbres, et les gnomes, et tout partout. « Je sais, petite fée Iris. J’aimerais beaucoup rester avec toi, mais je dois partir avec Maman et Papa. » La petite fée était toute rouge, et elle tapait du pied. Elle était très fâchée. Puis elle s’illumina de toutes les couleurs et se mise à virevolter autour de Lilou et à taper sur la boîte à biscuits.

« Il n’y a plus de biscuits, petite fée. Ce n’est plus qu’une vilaine boîte… »

Mais la petite fée continuait de sautiller tout partout. Elle sauta dans la boîte, en rigolant et en faisant des grands, grands signes avec ses bras. Lilou comprit enfin ce que la petite fée lui disait : elle pourrait amener la fée Iris avec elle ! Et elles pourraient continuer de voler, et faire des tours, à la ville ! Lilou referma la boîte tout doucement, en laissant un petit espace pour que la fée respire, et fila à la maison.

« Tu es allée chercher de beaux coquillages, Lilou ? »

« Oui, maman ! » répondit Lilou en rougissant. La boîte à biscuits tremblait dans ses mains.

“Chuuut chuchota Lilou à la petite fée en l’amenant avec elle jusqu’à la voiture. Lorsque Lilou, Maman, Papa et la fée Iris arrivèrent finalement à la maison, la petite fée était tout excitée de voir la chambre de Lilou. Elle voulait essayer tous les jouets, mais Lilou devait aller à l’école, le lendemain.

Lilou détestait l’école ! Tout le monde était méchant. Son professeur sentait mauvais, et elle devait rester assise toute la journée. Une chance qu’il y avait les après-midi ! Dès que l’école finissait, elle courait à la maison et s’enfermait dans sa chambre pour jouer avec la fée. Elles volaient, et elles faisaient des tours de magie, et elles mangeaient des biscuits, et tout était comme avant !

Lilou avait toujours très hâte de retourner à la maison pour jouer avec sa fée. Mais peu à peu, elle s’habituait aussi à aller à l’école le matin, et la fée commençait à bien s’ennuyer, toute seule toute la journée. Lilou venait de moins en moins jouer avec elle. Elle allait à des fêtes, et elle restait jouer au basketball avec les copines. Plus le temps passait, plus la fée s’ennuyait. Toute seule dans la chambre de Lilou, elle devenait toute faible.

Lilou avait très peur pour sa fée. Elle avait de plus en plus de misère à faire des tours de magie, et ses ailes ne brillaient pas comme avant. Elle ne faisait même plus la fofolle pour l’amuser ! Lilou avait bien peur pour sa fée, et un jour, la fée refusa de sortir de la boîte à biscuits. Lilou se mit à pleurer, dans sa chambre, en serrant la boîte fort, fort, fort sur sa poitrine.

« Dis-donc Lilou, qu’est-ce qui se passe ? » demanda Maman en entrant dans sa chambre.

« C’est ma fée, » répondit Lilou d’une toute petite voix.

« Mais Lilou, qu’est-ce que tu fais avec une fée ? » demanda Maman.

« Je l’ai amenée dans ma boîte à biscuit, parce que je voulais être avec elle tout le temps ! »

« Oh, Lilou ! » Maman ouvrit la boîte, et vit la toute petite fée toute faible dans la boîte. Maman avait l’air très triste, elle aussi.

« Tu sais, moi aussi j’avais une petite fée, quand j’étais petite. Ce n’est pas parce que tu passes du temps avec tes amis que ta fée ne va pas bien aller, c’est parce qu’elle doit être dans les bois, avec les siens ! »

La petite fée était toute piteuse dans la boîte.

« J’ai peur Maman, est-ce que la petite fée va bien aller ? »

« Bien sûr chérie. Allez, repose toi, ne t’en soucie pas. Tu vas voir, tout va bien aller demain matin. »

Lilou donna un bisou à sa Maman et à sa fée, et se pelotonna dans son lit, où elle rêva à sa fée et à la forêt, et à Maman et à sa nouvelle amie Milly. Lorsqu’elle se réveilla, elle ouvrit sa boîte à biscuits pour voir sa fée, mais il n’y avait plus de petite fée.

« Maman ? Ma fée est partie ! »

« Elle est repartie dans les bois, Lilou chérie. Mais avant de partir, elle m’a dit que si tu as envie la voir, tu n’as qu’à penser à elle fort, fort, fort, et elle viendra te voir. »

« Vraiment Maman ?! »

« Vraiment Lilou ! »

Lilou embrassa fort, fort, fort sa Maman. La fée serait toujours dans son cœur, mais elle se demandait ce qu’elle allait apprendre, aujourd’hui à l’école. Et peut-être qu’elle pourrait aller jouer chez Milly, après les devoirs ?

Il faudrait qu’elle demande à Maman…


Lire une autre histoire